Comment choisir?
Bien souvent les gens qui subissent des comportements déplacés ou qu’ils jugent inappropriés de la part d’un collègue au travail ne savent pas vraiment comment le faire cesser. new text
Dans certain cas, ils s’adresseront au gestionnaire pour redresser la situation ou à un représentant syndical de confiance. Certains tenteront de régler eux-mêmes la situation en appliquant les principes qu’ils connaissent en matière de gestion de conflits.
Au terme de ces discussions et tentatives pour tenter de faire cesser les comportements non désirés, à défaut d’obtenir un résultat satisfaisant, une partie pourrait envisager de déposer une plainte en matière de harcèlement psychologique en vertu de la politique en vigueur chez son employeur, dans l’espoir de régler le problème une fois pour toute.
Engagé dans ce processus, dépendamment des politiques et procédures existantes chez son employeur, le plaignant pourrait se voir offrir la médiation. A cette étape, il hésitera et cherchera à comprendre la différence entre les deux processus et lequel serait le plus avantageux pour l’atteinte de son objectif.
Il faut donc circonscrire l’objectif recherché. Dans certaines circonstances, la médiation peut difficilement être envisagée. Par exemple, une partie qui a longuement souffert avant de déposer sa plainte pourrait ne plus souhaiter voir la personne visée par cette plainte. Il se pourrait que le dommage subit soit tellement important qu’une partie refuse d’emblée un processus de médiation. En fait, dans la majorité des dossiers de plaintes en matière de harcèlement sexuel, la partie plaignante refuse habituellement la médiation, avec pour motif qu’il ou elle a tellement souffert qu’il n’y a plus espoir de régler la situation.
La médiation
La médiation peut-être le processus approprié quand la partie plaignante souhaite que les comportements non désirés cessent et qu’elle est appelée à continuer à travailler avec la personne visée par la plainte. La médiation pourrait permettre de replacer le compteur à zéro avec une compréhension commune de ce qui irrite l’autre afin d’éviter un débordement éventuel, de part et d’autre. De plus, la médiation permet aux deux parties de convenir comment ils communiqueront, un et l’autre, à l’avenir si occurrence de comportements non désirés. Plus souvent qu’autrement, la situation a dégénérée parce que les parties n’ont pas su se dire ce qui, des comportements de l’autre, les dérangeaient.
La médiation est une démarche qui se veut volontaire. En conséquence, les deux parties impliquées doivent consentir à y participer. La médiation permet aux parties de dégager des pistes de solution afin d’éviter que les comportements non désirés ou dérangeants se reproduisent. En somme, l’idée est de s’asseoir avec une tierce partie dite neutre et impartiale afin d’identifier, de part et d’autre, les comportements qui ont constitué des irritants dans le passé. Ceci afin de convenir des pistes de solution pour assainir le climat de travail et faire cesser les comportements qui ont su déranger. Il est utile de rappeler que la médiation ne se veut surtout pas un exercice pour trouver un coupable ou le plus coupable. Dans cet ordre d’idée, un et l’autre ne peuvent exiger que l’autre partie s’excuse. Habituellement, les deux parties sont convaincu qu’ils ont raison. La démarche vise plutôt la recherche de pistes de solution qui éviteront, pour un et pour l’autre, des frustrations éventuelles. L’exercice suggéré habituellement est de regarder dans le passé pour identifier les irritants et ensuite les parties sont appelés à discuter les pistes de solution en lien avec ces irritants passés. Le médiateur, ou tierce partie neutre ne peut imposer un règlement ou une décision. Le médiateur facilitera la discussion et supportera les parties impliquées afin qu’ils déterminent ensemble les pistes de solution. Une médiation réussie conduit à la signature d’un protocole d’entente (engagements) qui a la valeur d’un contrat une fois signé. Il revêt pour les parties un caractère obligatoire.
La médiation est en somme une négociation assistée afin de s’assurer que les parties ont convenu d’un terrain d’entente dans lequel ils acceptent de poursuivre les activités quotidiennes au travail afin d’éviter qu’une ou l’autre partie soit affectée par des comportements non souhaités. Cette démarche faite de bonne foi, donne habituellement des résultats intéressants. Normalement, les engagements signés par les deux parties impliquées, seront donnés aux gestionnaires afin qu’on assure le respect de ceux-ci. Les parties qui s’engagent dans une médiation conservent un parfait contrôle sur leurs dossiers et peuvent se retirer du processus à tout moment.
Les médiations n’ont pas tous lieux sous le même format. Le médiateur mandaté devra ajuster son approche et le processus suivi aux individus impliqués et à la situation présentée. Le médiateur, habituellement, aidera les parties à circonscrire les irritants du passé (les comportements que l’on souhaiterait voir changer) et supportera chacune des parties afin de trouver des pistes de solution. Un médiateur aguerri saura supporter les parties voire aider celles-ci à trouver des pistes de solution réalistes et viables au sein du milieu de travail afin de régler le différend qui oppose les deux parties. Les pistes de solution devraient permettre aux deux parties un retour au travail harmonieux. L’idée est de définir le terrain d’entente de chacun afin d’éviter les frustrations éventuelles et discuter ensemble comment les parties communiqueront advenant récidive d’une situation identifiée ou autres comportements qui pourraient constituer un nouvel irritant. Cette dernière partie de la médiation est la plus importante du processus. Les parties doivent convenir de la façon dont ils communiqueront à l’avenir. Plus souvent qu’autrement, les parties se sont retrouvés dans cette impasse parce qu’ils avaient de la difficulté à communiquer franchement et proprement et ce, en raison des comportements et attitudes de l’un ou de l’autre.
La plainte et l’enquête en matière de harcèlement psychologique et sexuel.
L’employé affecté par des propos, gestes ou comportements qu’il juge inappropriés peut décider de poursuivre avec sa plainte de harcèlement. Une fois cette décision arrêtée l’employeur mettra en branle le processus qui permettra de déterminer si nous sommes en présence ou non de harcèlement au sens de la loi et de la politique. L’employeur, en fonction des règles internes, choisira de traiter lui-même la plainte ou utilisera les services d’un consultant extérieur pour agir.
La première étape de ce processus est de déterminer si la plainte est recevable ou non. L’étude de recevabilité vise à évaluer si la plainte est sérieuse, par opposition à une plainte frivole ou dénuée de toute chance de réussite. On considérera que la plainte est sérieuse si, à première vue, les faits allégués présentent une apparence suffisante de fondement pour qu’il soit justifié d’entreprendre une enquête plus approfondie. À ce titre, il n’est pas nécessaire d’être certain hors de tout doute que la plainte serait éventuellement jugée fondée.
Les allégations du Plaignant doivent aller au-delà de l’expression d’une impression ou d’une perception subjective. Le Plaignant doit fournir des faits précis, concrets et vérifiables, que l’on puisse apprécier en fonction d’une personne compétente, impartiale et objective (perspective de la personne raisonnable).
Normalement, l’étude de recevabilité se fait après avoir parlé au plaignant uniquement. Bien souvent la personne visée par la plainte n’est pas encore avisée de l’existence de cette plainte. La personne visée par la plainte, dépendamment des politiques en vigueur chez l’employeur, risque d’être avisée uniquement si la plainte est jugée fondée après avoir confirmation du plaignant qu’il ou elle souhaite aller de l’avant.
Une fois la plainte jugée recevable, une enquête doit être entreprise par un représentant de l’employeur ou un consultant externe. Lors de cette enquête, les parties ou les témoins rencontrés devront signer un engagement pour respecter la confidentialité. La version du plaignant sera colligée et les collègues dont le témoignage peut être pertinent, seront rencontrés. Les parties impliquées pourront suggérer le nom des personnes qui mériteraient d’être rencontrées, mais il appartient à l’enquêteur mandaté de déterminer la pertinence de ces témoignages. L’enquêteur n’a pas à rencontrer l’ensemble des personnes identifiées.
Au terme de cette enquête, la personne visée par la plainte sera rencontrée afin d’obtenir sa version des faits en lien avec les allégations déposées au soutien de la plainte. Copie des allégations au soutien de la plainte devront être acheminées à la personne visée par la plainte avant cette rencontre afin d’obtenir sa version des faits. Ces règles ont été édictées par la Cour d’appel dans l’affaire Ditomène c. Boulanger (2014 QCCA 2108)
L’enquêteur mandaté devra rédiger un rapport dans lequel il conclura si, ce qu’il retient des allégations constitue du harcèlement au sens de la Loi et de la politique en vigueur chez l’employeur qui habituellement reprend le texte de loi.
Essentiellement, ce rapport reprendra les allégations retenues et expliquera en quoi les 5 critères énoncés dans la loi ont été rencontrés ou non rencontrés. Les 5 critères énoncés dans la loi doivent être rencontrés pour conclure à la présence de harcèlement.
Conclusion.
La plainte en matière de harcèlement ne donne pas toujours le résultat escompté par le plaignant. Dans bien des situations (plus de 30%) les conclusions du rapport seront à l’effet qu’il n’y a pas présence de harcèlement au sens de la loi. Dans ce contexte, une partie plaignante pourrait devoir reprendre le travail avec un collègue contre qui il a déposé une plainte sans que le véritable problème soit réglé.
Bon nombre de ces plaintes rejetées, si les employeurs se contentent de remettre les parties en présence, donneront des résultats désastreux après. Bien souvent le plaignant débouté cherche à quitter le milieu de travail et ce, en raison de la pression de ses pairs impliqués, qui bien que ce soit confidentiel, sont tous au courant, ou en raison de la pression exercée par la personne visée par la plainte qui s’est fait dire qu’il n’y avait pas présence de harcèlement au sens de la loi.